L’extrême ultraviolet (EUV), indispensable à la gravure de puces en 7 nm et au-delà, reste l’équipement le plus stratégique interdit à la Chine. Sans accès à ces machines, les fondeurs chinois comme SMIC doivent se contenter de technologies plus anciennes, comme la lithographie à ultraviolet profond (DUV). Certaines DUV à immersion sont également bloquées car elles intègrent des composants américains.
Mais un rapport du Financial Times révèle que Shanghai Yuliangsheng Technology Co., société liée à Huawei, a assemblé la première machine DUV maison. SMIC est actuellement en train de la tester.
Comment fonctionne cette machine DUV chinoise ?
La DUV de Yuliangsheng exploite la lithographie par immersion, où un liquide ultra pur (souvent de l’eau) est placé entre la lentille et le wafer. Cela permet d’augmenter la résolution et donc de graver des motifs plus fins.
Sur une seule exposition, cette machine peut descendre jusqu’au 28 nm, comparable au modèle Twinscan NXT:1950i d’ASML sorti en 2008.
Avec plusieurs expositions (multi-patterning), SMIC pourrait produire des puces en 7 nm voire 5 nm, mais avec un coût accru et un risque d’erreurs d’alignement (overlay errors, pitch walking), réduisant les rendements.
Une machine encore hybride, mais un objectif clair
La DUV de Yuliangsheng intègre déjà majoritairement des pièces chinoises, même si certaines restent importées. L’ambition est d’arriver à une machine 100 % made in China, échappant totalement aux sanctions américaines.
Si cet objectif est atteint, SMIC pourrait sécuriser un accès indépendant aux DUV à immersion, un atout crucial pour son industrie.
Quel avenir pour SMIC et Huawei ?
En 2023, Huawei et SMIC avaient déjà surpris le marché en lançant le Kirin 9000S en 7 nm pour le Mate 60 Pro, malgré les restrictions. Mais depuis, les progrès sont restés limités : sans machines EUV, il est impossible de rivaliser durablement avec TSMC et Samsung, qui préparent déjà le 2 nm.
L’étape suivante pour la Chine sera de concevoir un EUV haute ouverture numérique (High NA EUV) domestique. C’est la seule voie pour rattraper ses concurrents et espérer fabriquer des puces de 2 nm.
Et après ?
- 2027 : SMIC devrait commencer à utiliser la DUV de Yuliangsheng pour la production en 28 nm.
- Moyen terme : exploitation du multi-patterning pour descendre en 7/5 nm, malgré des coûts et défauts élevés.
- Long terme : développement d’un EUV chinois capable de rivaliser avec ASML.
La DUV de Yuliangsheng n’est pas une révolution immédiate, mais c’est un premier jalon symbolique vers l’autonomie chinoise en lithographie. Sans EUV maison, SMIC restera derrière TSMC et Samsung, mais cette avancée montre que Pékin trace sa route, même si le chemin est long.



