Lors de sa grand-messe re : Invent 2025 à Las Vegas, AWS a dévoilé une série de nouveautés qui montrent clairement une chose : Amazon veut prendre une longueur d’avance dans l’IA agentique — celle où les IA ne se contentent plus d’assister, mais agissent, raisonnent, et travaillent comme de véritables coéquipiers.
La plateforme Amazon Bedrock AgentCore accueille ainsi trois briques majeures : Policy, Evaluations, et Episodic Memory.
En parallèle, AWS lance une catégorie entièrement nouvelle : les frontier agents, des agents autonomes conçus pour mener des projets complexes avec un minimum de supervision humaine.
Automated Reasoning : l’ADN technique d’AWS pour fiabiliser l’IA
Ce mouvement repose sur une conviction forte de AWS : ramener des garanties mathématiques dans un monde dominé par des modèles probabilistes.
La firme continue ainsi de s’appuyer sur l’automated reasoning, des techniques de vérification formelle utilisées pour tester des systèmes critiques, désormais appliquées aux comportements des agents IA.
Un positionnement radical, unique dans l’industrie.
Comme l’explique Swami Sivasubramanian, VP Agentic AI chez AWS : « Nous sommes à la veille d’une transformation tectonique. L’IA agentique va redéfinir ce qu’il est possible de faire ».
1. Policy: la couche qui impose les règles — même quand l’agent déraille
C’est probablement la fonctionnalité la plus stratégique. Le module Policy agit comme une couche externe à l’agent, indépendante de son raisonnement interne.
Objectif : empêcher un agent de contourner les règles, volontairement ou non.
Exemple donné par AWS :
- un agent de support peut accorder un remboursement jusqu’à 100 dollars
- au-delà, la politique l’oblige à rediriger vers un humain
- même si quelqu’un tente un prompt injection pour lui faire outrepasser la règle, la policy bloque l’action
Contrairement au fine-tuning traditionnel, ici les règles ne peuvent pas être « oubliées ».
David Richardson, VP AgentCore, résume très bien le problème : « Il est facile de subvertir le raisonnement d’un agent. C’est pour cela que nous avons placé la politique à l’extérieur ».
Cette approche utilise les mathematical proofs d’AWS Automated Reasoning Checks afin de garantir que les actions prévues respectent les règles établies.
2. Episodic Memory: la mémoire qui ne se déclenche qu’au bon moment
Après la mémoire courte/longue durée, AgentCore gagne une mémoire épisodique, inspirée du fonctionnement humain. Contrairement à la mémoire « classique » d’un agent, cette mémoire se déclenche uniquement lorsqu’un signal pertinent apparaît.
Quelques exemples concrets :
- se rappeler la place préférée dans l’avion d’un utilisateur
- conserver son budget moyen pour un voyage
- retenir un choix récurrent, mais inutile d’y réfléchir à chaque interaction
Cette mémoire réactive permet moins de surcharge dans le contexte, pas besoin d’instructions personnalisées complexes et des interactions plus naturelles et continues.
3. Evaluations : surveiller en direct la qualité des agents
AgentCore propose désormais :
- 13 évaluateurs préconstruits
- la possibilité de créer ses propres métriques
- des alertes en temps réel en cas de dérive de qualité
Chaque agent peut être monitoré comme un service critique : détection d’erreurs, hallucinations, incohérences, comportements dangereux, baisse de performance…
Un vrai tableau de bord qualité pour les entreprises déployant des dizaines d’agents simultanément.
4. Frontier agents : AWS lance une nouvelle génération d’agents autonomes
C’est l’annonce la plus ambitieuse : AWS introduit une classe d’agents totalement autonomes, capables de gérer des projets complets, pas seulement des tâches isolées.
Selon AWS, ce sont : « des agents indépendants, scalables, capables d’agir comme des membres d’équipe ».
Trois premiers représentants arrivent :
Kiro — l’agent de codage autonome
- écrit du code
- corrige les bugs
- réalise des revues
- planifie lui-même les tâches à exécuter
Un concurrent direct des agents de Google, OpenAI ou d’outils comme Windsurf.
AWS Security Agent
Une pièce maîtresse pour DevSecOps :
- vérifie automatiquement les standards de sécurité
- inspecte les applications en continu
- élimine les « checklists génériques » au profit de règles vraiment métier
AWS DevOps Agent
Pensé pour les équipes en astreinte :
- analyse incidents et anomalies
- corrèle logs, métriques et traces (CloudWatch, Datadog, Splunk…)
- identifie seule la cause racine
- propose ou applique des correctifs
AWS ne parle plus d’assistants… mais d’agents qui interviennent réellement sur les systèmes.
AWS met la pression sur Google, OpenAI et Microsoft
Avec ces ajouts, AWS s’oriente clairement vers un futur où les agents seront nombreux, coopéreront, géreront des pans entiers de l’infrastructure, de la sécurité et de la production logicielle et où la fiabilité mathématique deviendra un avantage compétitif clé
C’est aussi une réponse directe au mouvement de Google et OpenAI vers les agents asynchrones (« teammate agents », « superagents », etc.).
La différence majeure d’AWS : la sécurité et la gouvernance passent avant tout.
L’IA agentique entre dans son ère professionnelle
Avec AgentCore enrichi et les frontier agents, AWS envoie un message clair : l’IA agentique quitte le stade de l’expérimentation pour devenir un outil d’entreprise, fiable, sécurisé et mesurable.
Les prochains défis seront évidents : orchestrer plusieurs agents en parallèle, assurer leur coordination et gérer les risques de dérive et de décision autonome
Mais une chose est sûre : 2026 sera l’année où l’IA ne sera plus « un assistant », mais un collaborateur numérique à part entière.



