Huawei frappe un grand coup dans la guerre technologique sino-américaine. Lors de sa conférence Huawei Connect à Shanghai, le géant chinois a annoncé un plan stratégique sur trois ans visant à concurrencer Nvidia sur le terrain des puces d’intelligence artificielle, non pas en surpassant la puissance brute de ses rivaux, mais en misant sur une approche systémique et massivement scalable.
Du Ascend 950 au « SuperPod » : Huawei réinvente l’architecture IA
Au cœur de ce plan figure une vision audacieuse : contourner les restrictions américaines en misant sur l’agrégation de puissance plutôt que sur la performance individuelle des puces.
Eric Xu, président tournant de Huawei, l’a affirmé sans détour : les puces Ascend actuelles ne rivalisent pas encore avec Nvidia en termes de vitesse ou d’efficacité énergétique.
Mais, Huawei veut compenser ce retard par l’interconnexion massive de milliers de processeurs dans des superclusters capables de former des modèles d’IA à grande échelle.
Le système baptisé « SuperPod » pourra connecter jusqu’à 15 488 puces Ascend via une infrastructure réseau 62 fois plus rapide que la concurrence, selon la marque.
Roadmap technique : Ascend 950 en 2026, Ascend 960 en 2027
La feuille de route de Huawei est déjà tracée :
- En 2026, la société lancera la série Ascend 950, accompagnée de sa propre mémoire à large bande passante (HBM), pour créer des architectures cohérentes en termes de puissance et de bande passante.
- En 2027, arrivera le Ascend 960, avec pour objectif déclaré de rattraper Nvidia d’ici 2028.
Selon Bloomberg, ces avancées permettraient aux entreprises chinoises de développer leurs propres modèles de langage sans dépendre de la technologie étrangère — une étape clé vers l’autonomie technologique nationale.
Un soutien politique explicite pour contrer les sanctions

La stratégie de Huawei s’inscrit pleinement dans la vision du gouvernement chinois qui a interdit l’utilisation de processeurs Nvidia par les entreprises nationales. Cette politique vise à stimuler l’innovation locale et à réduire la dépendance à l’égard de technologies étrangères, en particulier américaines.
Ce plan à long terme est perçu par les experts comme un acte fort dans la rivalité technologique sino-américaine. Huawei suit une structure stratégique analogue à celle de Nvidia, preuve que la Chine peut tenir la cadence de l’innovation, même sous embargo.
Cette montée en puissance pourrait entraîner :
- Une restructuration des chaînes d’approvisionnement mondiales,
- Une diversification des alternatives face aux solutions américaines,
- Et une redistribution des cartes dans l’IA de pointe.
Des obstacles industriels à franchir
Malgré l’ambition, Huawei reste confronté à des défis majeurs. La production des puces est confiée à SMIC, un fondeur chinois lui aussi impacté par les sanctions américaines, notamment en ce qui concerne l’accès aux machines de gravure avancées (EUV).
De plus, les performances réelles des « SuperPods » dépendront fortement :
- De l’optimisation logicielle,
- De l’efficacité énergétique globale,
- Et de l’écosystème IA autour des puces — des domaines où Nvidia reste très en avance, selon TechRepublic.
La réaction des marchés est restée modérée, avec une légère volatilité sur le titre Nvidia. Mais, la stratégie de Huawei pourrait bien accélérer l’adoption de l’IA en Chine, avec des applications envisagées dans des secteurs tels que :
- Les véhicules autonomes,
- La santé et la découverte de médicaments,
- Et l’industrie intelligente.
D’après le Business Standard, ces nouveaux « supernœuds » de calcul visent à réduire la dépendance aux importations, tout en construisant une infrastructure IA nationale robuste.
Huawei contre Nvidia, l’heure du défi systémique
Avec ce plan étalé jusqu’en 2028, Huawei redéfinit le champ de bataille de l’intelligence artificielle. Il ne s’agit plus uniquement de gravure ou de puissance de calcul brute, mais d’intégration, de réseau, et de stratégie nationale.
Si Huawei réussit son pari, ce ne sera pas seulement une victoire contre Nvidia, mais une redéfinition du modèle d’innovation mondial, dans lequel la souveraineté technologique devient une arme géopolitique à part entière.



