L’Union européenne s’apprête à déployer un nouveau système de vérification d’âge numérique, conçu pour empêcher l’accès des mineurs à du contenu réservé aux adultes. Ce dispositif, toujours en cours de développement, s’annonce déjà comme une mesure controversée.
Pourquoi ? Parce qu’il repose entièrement sur l’infrastructure de Google, et plus précisément sur l’API Play Integrity.
Cela pourrait avoir des conséquences majeures pour les utilisateurs Android en Europe, en particulier ceux qui utilisent des ROM alternatives, des applications open source, ou qui sideloadent des APK en dehors du Play Store.
Vérification d’intégrité via Google : une dépendance imposée ?
D’après les premières informations partagées dans un rapport officiel, le système européen de vérification d’âge fonctionnera à l’aide d’une application en marque blanche (white-label), intégrant un contrôle d’intégrité Android. Pour passer ce contrôle, une application devra obligatoirement :
- Être téléchargée depuis le Google Play Store
- Être certifiée et licenciée par Google
- Être installée sur un appareil certifié sécurisé par Google
Autrement dit, toute application installée via un store alternatif (comme F-Droid, Aurora Store, ou même depuis un site web), ou compilée manuellement à partir du code source, sera bloquée par ce système de vérification.
C’est un coup dur potentiel pour la philosophie d’ouverture d’Android, historiquement opposée à l’approche fermée d’Apple.
Une menace pour les utilisateurs avancés et l’écosystème open source
Pour la communauté Android open source, cette décision soulève de vives inquiétudes. Elle pourrait empêcher des millions d’utilisateurs de ROM personnalisées (comme LineageOS ou GrapheneOS) d’accéder à certains services réglementés en Europe. Même les applications parfaitement sûres, mais distribuées en dehors du Play Store, deviendraient inutilisables dans ce cadre.
À travers l’API Play Integrity, Google joue le rôle d’intermédiaire de confiance… au détriment de la diversité logicielle. Et l’UE semble prête à accepter cette dépendance technologique en échange d’un système plus sécurisé pour les mineurs.
Un compromis entre sécurité et liberté numérique ?
Les autorités européennes promettent que le système sera respectueux de la vie privée. Après une vérification d’âge unique, aucune donnée ne serait collectée ni utilisée à d’autres fins. L’application n’aurait pour rôle que de confirmer votre majorité, puis de se faire oublier.
Mais ce modèle pose question : le respect de la vie privée peut-il vraiment cohabiter avec une dépendance totale à Google pour valider l’intégrité d’une app ou d’un appareil ?
L’Europe n’est pas seule dans cette démarche. Aux États-Unis, un projet de loi bipartisan vise à imposer des vérifications d’âge avant le téléchargement de réseaux sociaux, aussi bien sur l’App Store d’Apple que sur le Google Play Store. Le but est le même : renforcer la protection des mineurs dans un environnement numérique devenu difficile à contrôler.
Ce que cela signifie pour l’avenir d’Android en Europe
Si le système européen est déployé tel quel, il pourrait reconfigurer totalement l’expérience Android dans l’UE. À terme, cela reviendrait à transformer Android en un système fermé, sous contrôle indirect de Google, du moins pour les applications nécessitant une vérification d’âge.
Et cela pose une question plus large : les plateformes dominantes comme Google doivent-elles devenir les garants de la conformité aux lois européennes ? Ou est-ce une délégation de pouvoir excessive qui menace la neutralité du numérique ?
La date de déploiement du système n’est pas encore connue, mais il est clair que les utilisateurs Android européens doivent se préparer à d’éventuelles limitations, surtout ceux habitués à personnaliser leur système ou à installer des apps hors Play Store.
Pour les utilisateurs en dehors de l’Europe, notamment aux États-Unis, cela pourrait être un avant-goût des régulations à venir.



